Je n'reconnais plus personne en Harley Davidson... (Serge GAINSBOURG)
De temps en temps il faut bien ravitailler les cabanes, faire quelques travaux rapporter les poubelles etc, etc, etc.... Alors pour nous ce ne sera même pas en Massey FERGUSSON, mais en John DEERE que nous partirons faire cette manipe log. Deux tracteurs et quatre manipeurs pour aller faire le plein des cabanes Morne et Ratmanoff. Toute une expédition pour environ 60 heures hors de la base. Ce temps est divisé en trois parts équivalentes : 20 heures pour les cabanes, 20 heures pour les repas et le repos et enfin 20 heures pour les transits. Denise, la petite marie (entendez, personnel de salle), Antoine, « l'instrum » celui qui s'occupe de toute l'électronique, Gilles, le Géner, le responsable de la log pour l'IPEV forment le reste de l'équipe.
Pour savoir ce qu'est une manipe log, il faut la vivre. Il faut surtout vivre ces 20 heures de tracteur sans amortisseurs, sans chauffage, pour l'un d'eux, sans place pour le passager. Juste un petit coin de cabine derrière le siège du conducteur où on tente de se caler, un bout de mousse glissé sous les fesses et qui s'échappe à chaque sursaut. Des sursauts il y en a tout le temps.
Pour le deuxième tracteur c'est un peu mieux. D'abord la cabine est en principe chauffée. Cela n'empêchera pas d'avoir les pieds gelés pendant tout le trajet. Puis ce tracteur possède un strapontin à côté du chauffeur. Placé très en avant (il n'y a pas d'autres places), les genoux repliés et les pieds bloqués sur la vitre avant, on tente de se maintenir en place grâce à la poignée placée juste au dessus. C'est la partie la moins agréable de ce genre de manipe, pourtant si importante pour les VSC et les scientifiques qui occupent ces cabanes. Il faut compter un peu plus de 8 heures pour aller et autant pour le retour et tout ça pour une trentaine de kilomètres. Vivre à Kerguelen implique d'accepter ce genre de situation et nous le faisons sans (trop) nous plaindre.
Dans le remorque, qui répond au doux nom de : « La Périlleuse », des bouteilles de gaz, pour les gazinières et le chauffage, des matelas, venant remplacés ceux pris pour maison par des souris frileuses, une gazinière neuve, des outils pour les travaux sur place, de la nourriture pour refaire les stocks dans les cabanes, des pharmacies préparées par le Médecin et surtout de l'eau, des touques d'eau.
Chaque touque contient une quarantaine de litres. En tout nous remplirons les cuves de Pointe Morne et Ratmanoff guetteur avec environ 1000 litres d'eau soit 25 touques. Avec ce ravitaillement les cabanes sont reparties pour au moins deux à trois mois en autonomie, ce qui veut dire qu'il faudra renouveler l'opération plusieurs fois pas an. Nous nous servons du captage d'eau qui se trouve à Estacade, une cabane située à un quart d'heure de Ratmanoff. Deux voyages seront nécessaires pour nos 25 touques. Avec les autres menus travaux, ces allers retours seront réalisés pendant notre journée sur place. Tout ce qui devait être fait a été fait, le contrat est rempli on peut maintenant admirer la nature qui nous entoure et prendre un peu de temps avec les manipeurs présents sur le site pour passer des petits moments de convivialité.
On ne s'en prive pas. Derniers regards, dernières photos de cet endroit fantastique. À la cabane Manchot, qui se situe à un quart d'heure de marche, Denise nous prépare d'excellents repas que nous prendrons tous ensemble. Antoine, Gilles et Florian (un ornitho) partent pêcher juste derrière la cabane. Il n'y a pas besoin d'aller bien loin pour attraper de belles truites. Le soir nous traînons un peu à table et les discussions s'enchaînent. Elles sont agréables avec toujours une pointe d'humour. On ri, on taquine, ce sont des bons moments de vies partagés, c'est la vie en cabane, mais CHUT ! « Ce qui se passe en cabane, reste en cabane », ici c'est la règle pour tous et soyez sûr que nous allons la respecter encore une fois. Adieu Rat' !